Le 13 décembre 2022, le Conseil des ministres a approuvé le projet de loi portant sur la modification du texte consolidé de la loi de réhabilitation foncière et urbaine. L’objectif de ce projet est d’éviter, entre autres, la paralysie de l’aménagement du territoire de nombreuses municipalités en raison de défauts mineurs facilement corrigibles. L’objectif du gouvernement est qu’il entre en vigueur à la fin de cette année, même si son approbation en tant que projet de loi et tout son traitement parlementaire sont toujours en attente.

L’avant-projet, bien que concis, présente des nouveautés importantes qui visent à accroître la sécurité juridique dans le domaine de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme.

Ensuite, le cabinet d’avocats Ashurst met en évidence les principales mesures que le gouvernement propose pour résoudre des problèmes tels que les petits défauts pouvant entraîner la nullité d’un développement urbain.

La nouvelle loi foncière, en quatre clés

De manière générale, l’avant-projet se concentre sur les questions suivantes:

a. Nullité et annulation. La nature mixte (technico-juridique) des actes fonciers et d’urbanisme est reconnue et une liste de vices de forme est introduite qui, en raison de leur pertinence, détermine la nullité de l’acte en question. Le reste des défauts non expressément listés pourront être corrigés évitant ainsi des « annulations disproportionnées ».

b. Positivation de la doctrine de la nullité partielle. Le chiffre de la nullité partielle des actes d’aménagement du territoire et d’urbanisme est introduit lorsque ladite nullité peut être individualisée par rapport à une certaine zone territoriale, à des préceptes ou à des déterminations spécifiques.

c. Limitation de la nullité en cascade. Jusqu’à présent, la déclaration de nullité d’un acte d’aménagement du territoire et d’urbanisme implique la nullité de tous ses plans d’aménagement et même de ses actes d’application. Toutefois, l’avant-projet entend circonscrire cette nullité en cascade aux seuls actes et actes qui contiennent le même vice de nullité que l’acte déclaré nul.

d. Limitation de l’action publique urbaine. Le droit d’exercer l’action publique urbaine est sensiblement limité dans la mesure où il est expressément lié à la défense des intérêts généraux.

Nullité et annulabilité

La principale nouveauté de l’avant-projet est celle qui fait référence au nouveau régime proposé de nullité et d’annulation des actes d’aménagement du territoire et d’urbanisme et qui est résumée ci-dessous:

a. Nature juridique des instruments d’aménagement du territoire et d’urbanisme. Une nouvelle section 2 est introduite dans l’article 4 TRLS pour déclarer la nature juridique diverse (mixte) des instruments d’aménagement du territoire et d’urbanisme composés : (i) des décisions stratégiques et de leur planification et (ii) des réglementations générales ou particulières.

b. Causes de nullité des actes d’aménagement du territoire et d’urbanisme. L’article 55 TRLS, qui s’intitulait Actes nuls de plein droit et est renommé Nullité et annulabilité des actes d’aménagement du territoire et d’urbanisme, est complètement modifié.

Conformément à la nouvelle rédaction du paragraphe 1 de cet article 55, la nullité de plein droit pour vice de forme ne peut être prononcée que par:

i) l’omission du processus d’évaluation environnementale;

ii) l’omission du processus d’information et de participation du public;

iii) l’omission des procédures de participation d’autres organismes par rapport aux rapports obligatoires dont la rectification est particulièrement complexe (parmi ceux qui sont identifiés, le rapport hydrologique, le rapport côtier, le rapport routier et autres infrastructures structurantes); et

iv) le manque ou l’insuffisance notoire de la mémoire dans laquelle se justifient les décisions de gestion adoptées.

Les autres vices de forme non expressément énumérés à l’article 1 précité n’entraîneront pas la nullité absolue de l’acte d’urbanisme, et pourront être corrigés avec effet rétroactif au moment de la procédure opportun.

Dans ces cas d’annulation, toutes les actions non affectées par le vice seront conservées et l’Administration disposera d’un an (prolongable de six mois supplémentaires) pour les corriger. Entre-temps, l’efficacité du plan annulé sera prolongée (à l’exception des déterminations qui ont été affectées par l’annulation).

Ce précepte, s’il est approuvé, aura d’importantes répercussions pratiques et nécessitera un examen au cas par cas pour savoir si le vice de l’acte en question implique l’application du régime de nullité ou d’annulation.

Positivation de nullité partielle

La nouvelle rédaction proposée de l’article 55 TRLS inclut dans sa section 3 une positivation du principe de nullité partielle introduit par l’arrêt 744/2020 de la Cour suprême du 4 mars 2020.

Conformément à la nouvelle rédaction de l’article, la nullité des actes d’aménagement du territoire et d’urbanisme sera, en tout état de cause, partielle lorsqu’ils peuvent être individualisés par rapport à une zone territoriale déterminée ou lorsqu’elle affecte des préceptes ou des déterminations spécifiques qui ne sont pas pertinents au reste du plan.

La pertinence pratique de ce précepte ressort clairement de l’arrêt 569/2020 de la Cour suprême du 27 mai 2020 concernant le Plan général de développement supplémentaire de Yaiza (Lanzarote) qui a été approuvé avec omission du rapport obligatoire des coûts. Dans cette affaire, la Cour suprême, en application du principe de nullité partielle qui serait désormais consacré par cet article 55.3 TRLS, a convenu que la nullité ne devait affecter que la zone affectée par le domaine public maritime-terrestre et ses zones de servitude, le reste du plan restant en vigueur.

Limitation de la nullité en cascade

La nouvelle rédaction proposée de l’article 55 TRLS inclut dans sa section 4 une limitation des effets de la nullité dite en cascade.

Aux termes de l’article précité, la nullité d’un acte d’aménagement du territoire et d’urbanisme ne doit affecter ses actes d’aménagement et les actes dictés en son application que lorsqu’ils souffrent du même vice que l’acte annulé. Toutefois, sa validité restera valable si ces instruments ou actes de développement ont une couverture suffisante dans l’instrument de réglementation antérieur à celui qui avait été abrogé ou dans les règlements résultant de l’application.

L’avant-projet vise, une fois de plus, à limiter les effets d’une déclaration de nullité qui, jusqu’à présent, avait de graves implications pratiques (parfois disproportionnées) car elle entraînait la nullité de toute planification du développement et des actes dictés en vertu de l’acte déclaré nul.

Action publique urbaine

L’Avant-projet modifie la rédaction des articles 5.f) et 62 TRLS pour donner un nouveau contenu plus limité à l’action publique urbaine.

Concrètement, le premier changement proposé par la réforme renvoie à la légitimité active subjective de l’action publique. Contrairement à la rédaction actuelle qui habilite toute personne à exercer l’action publique, l’Avant-projet de loi n’accorde ce pouvoir qu’aux personnes physiques et morales à but non lucratif.

De même, l’action publique doit s’exercer dans la défense des intérêts généraux liés à l’aménagement du territoire et à l’urbanisme et dans des aspects matériels ou substantiels. Elle ne peut être fondée sur de simples vices de forme, être l’action contraire au bien ou un abus de droit, ni prétendre à la reconnaissance et à la restauration d’une situation juridique particulière.

Enfin, l’Avant-projet de loi introduit expressément la nuance que le retrait de l’action publique ne peut entraîner une contrepartie économique. Il s’agit d’une tentative pour éviter la professionnalisation qui existait dans l’exercice de cette action publique.

Autres modifications

Bien que l’épine dorsale de la réforme se trouve dans les changements décrits, le projet de loi en profite pour modifier certains autres points, comme le soulignent les avocats d’Ashurst :

a. Silence négatif. Les cas d’application du silence négatif déclarés inconstitutionnels par les arrêts de la Cour constitutionnelle 143/2017, du 14 décembre, et 75/2018, du 5 juillet (parcelles, ségrégations et autres actes de division de propriétés) sont supprimés.

Toutefois, sont exclus du régime de silence négatif les travaux de construction de logements soumis à un régime de protection publique, destinés à la location sociale, promus par l’Administration publique, ses entités dépendantes ou par le biais de collaboration public-privé.

b. Compensation pour l’action d’urbanisation. Une nouvelle rédaction de l’article 38.2.a) TRLS est introduite après sa déclaration d’invalidité par l’arrêt de la Cour constitutionnelle 218/2015, du 22 octobre. Sans préjudice d’une évolution réglementaire ultérieure, la nouvelle rédaction précise le mode de calcul de l’indemnisation pour empêcher l’exercice du droit de participer à l’action ou en modifier les conditions.

c. Nouvelle plateforme télématique. Enfin, comme seule disposition supplémentaire, le projet contient l’engagement de mettre à la disposition des administrations publiques une plateforme en ligne qui accélère l’émission de rapports sectoriels dans le traitement des instruments de planification territoriale et urbaine.

En bref, pour le cabinet d’avocats Ashurst, le projet de loi préliminaire introduit une batterie de mesures visant à assouplir l’application stricte du principe de légalité qui a prévalu en Espagne en matière d’instruments fonciers et d’urbanisme et les graves conséquences qui découlent de cette application.