“La figure des Socimis canalise beaucoup d’investissements étrangers des pays occidentaux comme ceux d’Amérique latine”

Jesús González Nieto-Márquez, directeur du MAB (Marché Alternatif Boursier) espagnol, géré par l’opérateur boursier BME, depuis 2006 est aussi directeur de LATIBEX, marché de valeur latino-américain de la bourse espagnole.

Le MAB connait un véritable “boom” depuis quelques années avec notamment l’incorporation de sociétés immobilières cotées (socimis) qui représentent aujourd’hui une cotisation supèrieure à 10 milliards d’euros avec 78 entreprises. Rencontre.

Quel a été le bilan 2018 et que cela présage-t-il pour l’année 2019 ?

Ce fut une année florissante en terme d’incorporation de compagnies et aussi en terme de capital que ces entreprises ont levé. En 2018 nous avons intégré 20 nouvelles socimis en bourse. Au total, le MAB compte 68 socimis. C’est un marché qui s’est considérablement développé ces trois dernières années, à un rythme que jamais personne n’aurait pu imaginé.
Le MAB s’est attaché à accompagner cette demande grandissante de la part de ses entreprises qui a été généré par ce que l’on pourrait appeler un “écosystème”, pas seulement des socimis mais aussi par les gestionnaires de portefeuilles immobiliers, des avocats,auditeurs… Ils ont tous permis au marché de se développer très rapidement.

En 2018, les socimis du MAB ont réussi a levé environ un milliard d’euros. C’est l’année “du pic” mais il est vrai que les deux années précédentes ont également été florissantes puisque le bilan total des trois dernières années est de 1.7 milliard d’euros.
D’autant plus que les socimis exercent, pour la plupart, des activités très diversifiées: c’est peut-être la nouveauté de l’année 2018.

Par exemple, il faut noter l’entrée de deux socimis très actives dans le secteur touristique spécialisées dans la vente d’hôtels mais aussi dans le Retail, les bureaux, les logements… Certaines socimis développent une seule activité comme la vente d’hôtels ou de résidences. Mais, la plupart, possède un portefeuille équilibré et varié.

Tout cela permet aux socimis cotées au MAB de posséder un market cap de plus de 10.5 milliards d’euros à la taille du marché. Alors que les actifs sous gestion représentent un peu plus: aux alentours de 20/22 milliards. Si nous ajoutons les 4 socimis cotées en bourse possédant le plus grand marché, le chiffre se double.

Pour le moment, l’année 2019 est un peu plus tranquille et le restera jusqu’à ce que les comptes et les audits de 2018 se ferment. On pourra analyser les nouvelles incorporations aux marché à partir du second semestre. Cependant, les premières sollicitudes et demandes que nous recevons nous laisse présager une bonne année sans pour autant pouvoir établir un chiffre ni une taille de marché précis encore.

Comment faites-vous la promotion de ces socimis ?

Nous organisons des événements durant lesquels nous invitons à la fois des investisseurs internationaux et espagnols pour les faire se rencontrer. Le plus important, l’événement MEDCAP s’organise au mois de mai. Nous réunissons les acteurs du Real Estate et d’autres, avec les investisseurs espagnols et de l’Europe entière. En plus de cela, on organise un événement en dehors de l’Espagne souvent au second semestre. Par exemple, le BME se déplace à Paris, Francfort, New-York… pour des événements où on rencontre des investisseurs.

Les socimis du MAB sont relativement petites. De ce fait, il est difficile pour elles d’entrer en contact avec des investisseurs étrangers parce que ces derniers sont souvent attirés par des entreprises volumineuses. Les socimis du MAB travaillent donc généralement avec des investisseurs locaux. Ils ont plusieurs circuits comme celui des banques publiques ou privées ou quelques fonds d’investissements locaux.

La capitalisation boursière des socimis cotées en bourse est de 10 milliards d’euros.

Il y a seulement quatre socimis qui détiennent entre 50 millions et 1 milliard d’euros. Ce que nous essayons de faire avec le MAB c’est d’aider les socimis, de plutôt petites tailles, à se faire connaître afin qu’elles puissent se développer petit à petit.

Jesús González Nieto-Márquez, directeur du MAB espagnol et Philippe Chevassus, directeur de Le Courrier d’Espagne

Euronex (équivalent français du BME ) vient d’ouvrir un bureau à Madrid, quelle relation entretenez-vous avec la principale place boursière de la zone euro ?

Nous sommes nécessairement en compétition avec elle sur le marché. Pour autant, Euronex est  une grande bourse mais son bureau à Madrid est moindre. Je crois que leur implantation à Madrid est symbolique. S’implanter sur un marché coûte cher. Il faut s’assurer que l’entreprise grandisse en France. Le marché espagnol est particulièrement ouvert aux investisseurs internationaux,

75 à 80 % des tradings quotidiens de la bourse viennent de l’étranger.

Ainsi, il est très aisé d’acheter des biens espagnols de France et vice et versa. Techniquement, il n’est pas indispensable de s’implanter en Espagne pour intégrer son marché c’est pour cela que l’implantation d’Euronex à Madrid, s’apparente, selon moi, davantage à une opération marketing.

Quel est le coût minimal pour une entreprise qui souhaite cotiser ?

Il existe des tarifs mais ce n’est pas tant le coût de la bourse que l’ensemble des avocats, auditeurs, investisseurs, un webmaker… que l’entreprise doit payer qui fixe le prix. Au minimum, l’entreprise doit les payer 150.000 euros pour l’incorporation. Tout cela dépend de la taille de la compagnie, de ce qu’elle souhaite entreprendre, si elle souhaite lever du capital ou pas…

Vous êtes le directeur général de LATIBEX. Que peut apporter la relation que vous entretenez  avec l’Amérique latine par le biais de LATIBEX pour les potentiels investisseurs et les entreprises qui cotisent ?

Il est intéressant d’observer que même les petites et moyennes entreprises ont tendance à investir en Amérique latine. Ceci pour différents motifs: la langue, une autre forme de faire du commerce…

Plus important à souligner encore: les petites et moyennes entreprises emboîtent le pas des grandes entreprises. Elles vendent leur services au marché latino-américain et se rendent compte qu’elles peuvent se faire un nom là-bas. C’est une manière de préparer le terrain.

L’exemple de Cabify est très parlant, puisque c’est une start-up dite Licorn qui s’est développée uniquement en investissant en Amérique latine, sans mettre le pied dans le marché français par exemple. Qu’en dites-vous?

Il y a des petites entreprises dont la moitié de leur investissement vient d’Amérique latine. Le phénomène inverse se produit également. Par exemple, une socimi chilienne, Packhome a commencé à investir dans le marché des socimis européen. Elle détient des investissements immobiliers en Espagne, aux Etats-unis…Elle souhaite se développer en investissant ses actifs aussi au Chili.

Le MAB a été en quelque sorte la porte d’entrée au marché européen pour également deux autres socimis mexicaines.

Ces compagnies ne sont pas très connues en Espagne. Avec Latibex, nous organisons aussi des événements notamment Foro Latibex en novembre oú sont invitées des entreprises latino-américaines et énormément d’entreprises espagnoles qui travaillent en Amérique latine. Le dénominateur commun de ces événements est le commerce latino-américain.

Existe-t-il un équivalent du MAB en Amérique latine ?

Il existe quelques bourses alternatives mais relativement petites. De ce fait, les entreprises qui y sont cotées sont elles aussi petites ce qui rend difficile la formation d’un marché conséquent. Les entreprises latino-américaines ont plus d’intérêt à prendre contact avec la bourse du MAB espagnole plutôt qu’avec celles sur leur propre marché. Le MAB, contrairement aux autres bourses européennes, a l’avantage d’avoir le marché le plus mature du monde hispanique. Latibex illustre bien tout le potentiel du lien entre l’Espagne et l’Amérique latine, et celui du monde hispanique en général  pour le commerce, que sous-estime beaucoup les français.

Jesús González Nieto-Márquez, directeur du MAB espagnol

Des rapprochements cette année au sein des socimis?

Nous avons déjà reçu quatre contrats pour l’incorporation de nouvelles socimis dans le MAB. Je pense vraiment que le marché des socimis va se consolider dans l’avenir. La taille des entreprises est très importante et compte beaucoup dans les résultats finaux. Si tu as un portefeuille de 1 milliard d’euros c’est beaucoup mieux qu’un de 100 millions  pour se développer, pour capter du capital…

Il y a un potentiel pour les petites socimis qui fusionnent entres-elles. Par exemple, la socimi Vitruvio qui vaut 50 millions d’euros a fusionné avec une autre socimi Unica. Ensemble, elles ont développé un portefeuille de 160 millions d’euros.

L’enjeu pour les entreprises les plus conséquentes du MAB, de leur côté, est dans quelques années de basculer dans la grande Bourse, dans laquelle elles pourront lever des fonds plus importants. Ce chemin d’évolution naturel va continuer de se mettre en place. Je suis certain que la bourse du MAB va elle aussi évoluer.

La liquidité est un thème très important également. Une petite entreprise qui a très peu de liquidité, c’est très difficile pour elle de mener des opérations tous les jours. Elles doit attendre pour vendre et est moins attractive. C’est donc un enjeu pour les petites entreprises de se développer et d’évoluer afin de se diriger vers des investisseurs plus importants.

Une entreprise qui vaut 50 millions d’euros et qui a fait un placement de 20 millions placés dans 100 banques privées dont chacun a mis 0.5 millions, les rend  très heureuses parce que ce qu’elles souhaitent c’est une dividende qu’elles reçoivent de manière permanente avec un bon rendement. Pour autant, les investisseurs se rendent compte du potentiel de ces entreprises tout en sachant qu’elles ne peuvent pas vendre sur le champ. C’est un problème. C’est un peu le paradoxe de la cotisation.

La figure des socimis est entrain de jouer un rôle primordial dans le changement de cycle du secteur immobilier car elle a canalisé beaucoup d’investissements étrangers des pays occidentaux comme ceux d’Amérique latine.

Le Real Estate Trust, figure omniprésente dans tous les pays européens, est l’un des facteurs détonateurs qui a permis aux socimis de se développer sur le marché. De plus, les investisseurs espagnols sont en train de repenser leur manière d’investir et de gérer leurs investissements.

Une socimi est transparente et ne paye pas d’impôts mais doit distribuer 80% du bénéfice en dividendes à ses investisseurs.

D’ailleurs, le thème de la transparence est très important pour le MAB.

Traditionnellement, le secteur immobilier n’est pas considéré comme l’un des plus transparents en Espagne. Les socimis comme toutes autres entreprises qui cotisent au MAB ont une obligation de transparence: ils doivent informer le MAB de toutes leurs activités. Cette exigence est la même pour toutes les socimis quelque soit leur grandeur.

Par PC.

Jesús González Nieto-Márquez, directeur du MAB espagnol (BME) et Philippe Chevassus, du Courrier d’Espagne
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