El Gordo de Navidad : tradition, superstition et euphorie !

Il faut vivre en Espagne ou y être pendant les fêtes de fin d’année, pour comprendre (ou tenter de comprendre ) ce que les Espagnoles font le 22 décembre, chaque année, et cela, depuis deux cents ans ! Cette tradition donne d’ailleurs le véritable coup d’envoi des festivités de Noël…qui ne se termineront que le 7 janvier, juste après l’Epiphanie.

Il n’y a pas de loterie plus importante pour les Espagnoles que ce fameux “Gordo de Navidad”, le plus gros tirage au sort du monde, qui brasse plus de 3 milliards d’euros… Ce n’est pas une simple loterie, c’est un spectacle et surtout une tradition ancrée chez toutes les familles espagnoles même celles qui ne jouent jamais aux jeux d’argent !
Car, au-delà des sommes mirobolantes qui font rêver tout le monde, au-delà de cette espèce de communion nationale et sacrée autour du spectacle du tirage, célébrée dans la matinée du 22 décembre, c’est tout un pays qui s’unit en vue de ce moment extrêmement commenté, préparé et attendu.

Bien avant le jour J, les Espagnols font la queue, souvent pendant plusieurs heures, pour acheter les 100 000 billets de loterie. Le prix s’élève à 200 euros, mais il est possible, et cela se fait souvent, d’acheter “un decimo” soit un dixième du billet ce qui représente un investissement de seulement 20 euros. Pour multiplier leurs chances de gagner, les Espagnols partagent les billets avec leurs amis ou famille…ils s’échangent par Whatsapp la photo du numéro acheté et partageront les gains, le cas échéant. Aussi, les clubs de Sport et autres associations en profitent pour s’auto-financer en vendant les billets un peu plus chers… 

Mis en vente dès le mois de juillet, les Espagnols les plus passionnés mettent un point d’honneur à acheter cette loterie dans différentes régions ou villes, là encore pour multiplier leurs chances. Ils lisent avec avidité les articles sur les probabilités de gagner avec de tel ou tel numéros, la presse élaborant des pronostics plus ou moins farfelus… Cette année, même ChatGPT s’est fendu de quelques prédictions !

Les résultats du tirage se donnent en chantant et durent 4 h.

Ce sont des enfants, issus de l’orphelinat San Ildefonso qui chantent ou déclament sur une mélodie particulière les résultats, en direct à la télévision publique RTVE depuis le Teatro Real de Madrid, ce qui constitue le clou du spectacle… Les numéros des tickets et les gains sont inscrits sur des billes en bois réparties dans deux sphères. Au fur et à mesure du tirage, l’euphorie s’empare de tous, dans les villes ou villages des gagnants. Le gros lot (El Gordo) est de quatre millions d’euros tout de même ! Le deuxième numéro gagnant permet de remporter la coquette somme d’ 1 million 250 et le troisième 500 000 euros. Cette année, il y a plus de 3 milliards et demi à se partager !

Cette tradition permet de faire d’heureux gagnants, mais celui qui gagne le plus d’argent, c’est le fisc! El Gordo de Navidad est propriété de l’Etat (Loteria Nacional) et Hacienda récolte chaque année au passage quelques centaines de millions d’euros ! Car oui, les gains sont imposables ! Jusqu’à 40 000 euros, il n’y a rien à verser au fisc espagnol, mais à partir de 40 000 euros de gains, le taux d’imposition est de 20 %. Pour la petite histoire, sachez que depuis peu, la société Laguinda, propose même (moyennant finance bien sûr !) un système d’assurance, qui vous évitera de payer les taxes fiscales en cas de gains ! Oui, vous avez bien lu…Il suffit d’acheter le billet via leur application… Pour un billet de 20 euros, il faut leur payer 3 euros et si vous gagnez plus de 40 000 euros ou même les 4 millions du Gordo, ils payent pour vous les 20 % d’impôts !

C’est sous règne de Carlos III, en 1763, qu’un premier tirage de loto est organisé pour récolter des fonds pour les hôpitaux et les œuvres caritatives. Puis, en 1812, La Loteria est créée pour renflouer les caisses de l’État. Le tirage de Noël tel que nous le connaissons, date de 1892, et même pendant la guerre civile, le Gordo avait lieu ! En 1938, chaque camp avait sa loterie : une républicaine, à Barcelone, et l’autre, celle des franquistes, à Burgos.

Si vous n’avez pas encore de billets, il ne vous reste que quelques heures…car n’oubliez pas cette statistique implacable : “100% des gagnants…ont tenté leur chance” ! 

Laurence Lemoine

Valencia Expat services
Madrid Barcelone Javea-Denia