Madrid et Barcelone pourraient transformer leurs bureaux obsolètes en 28.000 logements

Une mesure contribuant à résoudre la crise du logement. Transformer des bureaux en logements dans de nombreuses rues du centre des grandes villes s’impose comme l’une des stratégies les plus efficaces du marché immobilier. En effet, face à la pénurie actuelle de logements et à la baisse d’occupation de nombreux espaces de bureaux due à l’essor du télétravail, leur conversion en habitations constitue une solution pertinente qui contribue à valoriser ces actifs tout en répondant aux besoins croissants en logements.

Selon le guide « Changement d’usage » en Espagne publié par Grupo Tecnitasa, Madrid et Barcelone comptaient à elles seules environ 2,5 millions de mètres carrés de bureaux potentiellement convertibles en logements en 2023. Leur conversion permettrait de créer 28 000 nouveaux logements, destinés à la vente ou à la location à loyer modéré, afin de satisfaire la forte demande.

Parmi les grandes villes espagnoles, Madrid se distingue avec 60 % des transactions réalisées, suivie de Barcelone et Malaga (7 % chacune). Séville, Valence, Alicante, Huelva, Bilbao, Palma et Saragosse suivent, avec des parts de marché plus faibles.

Ce domaine relevant de la compétence des communautés autonomes, il existe une grande variété de réglementations et de règles spécifiques.

En 2024, le nombre de transactions de changement d’affectation a doublé par rapport à l’année précédente, avec plus de 390 000 mètres carrés convertis. Cela a représenté un investissement de 900 millions d’euros, soit trois fois plus qu’en 2023. Selon une étude de Tecnitasa, 60 % de ces transactions concernaient d’anciens immeubles de bureaux.

Par ailleurs, dans certains cas, des bâtiments classés ou patrimoniaux sont rénovés pour devenir des résidences de prestige, générant une forte plus-value et nécessitant une planification urbaine et une gestion architecturale plus complexes.

Cependant, cette conversion de bureaux en espaces résidentiels n’est pas chose aisée, car, étant une compétence décentralisée relevant des communautés autonomes, elle est soumise à une grande diversité de réglementations et de règles spécifiques selon les lieux.

La Communauté de Madrid est l’une des régions ayant le plus assoupli sa réglementation pour faciliter ce type de transformations. La loi 3/2024 relative aux mesures d’urbanisme pour la promotion du logement, qui autorise temporairement les changements d’affectation des sols, permet la construction de logements sociaux dans les immeubles de bureaux sans modification du plan d’urbanisme, à condition qu’ils soient destinés à la location subventionnée et respectent les règles d’urbanisme et de hauteur.

En 2024, le nombre de transactions de changement d’affectation a doublé par rapport à l’année précédente, avec plus de 390 000 mètres carrés convertis.

L’objectif régional est ambitieux : transformer plus de 20 000 bureaux vacants en appartements locatifs sociaux. Mais la capitale est également pionnière en matière de conversion de bureaux en logements, notamment dans des quartiers comme Salamanca, Chamberí et Justicia, où ils sont transformés en appartements de standing.

Le gouvernement régional d’Andalousie a également mis en place des mesures pour accélérer la conversion des locaux commerciaux en logements. En février 2025, le décret-loi 1/2025 relatif aux mesures urgentes en matière de logement est entré en vigueur, autorisant la désignation d’usage alternatif de « logement résidentiel protégé » pour les terrains initialement destinés à des bureaux ou à d’autres usages. Cette nouvelle législation permet, par exemple, d’aménager des logements protégés sur des parcelles ou des bâtiments classés en zone de bureaux, sans qu’il soit nécessaire de modifier le zonage.

Face à la crise du logement aux îles Baléares, la loi 3/2024 relative aux mesures urgentes en matière de logement a été adoptée en 2024. Entre autres initiatives, elle a créé la catégorie de logements à prix limité (VPL). Concrètement, la loi autorise la conversion de locaux commerciaux ou de bureaux sous-utilisés en logements, à condition qu’ils soient situés dans des zones à faible demande commerciale ou d’entreprises. Cette mesure baléare vise à mobiliser les espaces vacants afin de créer jusqu’à 16 000 logements abordables que la communauté juge nécessaires.

À l’inverse, il est frappant de constater que la Catalogne ne dispose d’aucune réglementation récente pour faciliter ce changement d’usage, ce qui en fait l’une des régions les plus exigeantes en la matière. Cela implique le respect de réglementations générales et municipales aux critères très stricts. Les normes d’habitabilité en Catalogne rendent de nombreux petits bureaux ou bureaux situés en intérieur impropres à la conversion. De plus, l’obtention d’un certificat d’occupation est obligatoire pour le nouveau logement. De nombreux professionnels soulignent que la Catalogne figure parmi les régions où la conversion d’espaces de bureaux en logements est la plus complexe en raison des obstacles et de la réglementation.

L’objectif ambitieux de la Communauté de Madrid est de transformer plus de 20 000 bureaux vacants en logements locatifs abordables.

D’un point de vue financier, ce rapport souligne que la conversion de bureaux en logements peut s’avérer très intéressante, malgré d’importantes nuances. Le principe de base est qu’un immeuble de bureaux obsolète a généralement une valeur au mètre carré inférieure à celle d’un logement dans le même quartier. L’acquisition d’un immeuble de bureaux en vue de sa conversion permet un investissement initial plus faible, étalé sur plusieurs phases (d’abord l’achat, puis la rénovation), avec la possibilité d’obtenir des financements complémentaires au besoin, ce qui peut améliorer le retour sur investissement.

Cependant, les avantages ne sont pas automatiques. Des facteurs importants tels que le coût d’acquisition, les coûts de rénovation et de changement d’affectation, la valeur du produit final, la rentabilité brute et nette, l’horizon temporel et la fiscalité doivent être analysés avec soin. La durée moyenne de la conversion varie de un an et demi à trois ans, selon les biens immobiliers.

Projets de réaménagement clés

Parmi les grands projets de réaménagement réalisés à Madrid, la Torre Castelló se distingue. Situé au 50 rue María de Molina, cet ancien immeuble de bureaux du ministère des Finances, d’une superficie de 42 600 mètres carrés, a été acquis par Grupo Lar pour 204,7 millions d’euros. Le projet prévoit sa transformation en 153 appartements de luxe destinés à la vente, complétés par une résidence étudiante de 400 lits, ce qui en fera le plus important projet de reconversion résidentielle de la capitale.

Un autre immeuble de bureaux classique, ancien siège d’une banque situé au 53 rue Velázquez, est en cours de transformation en un complexe résidentiel de luxe comprenant 13 appartements haut de gamme. Par ailleurs, au 11 rue Jordán, l’ancien siège de Telefónica a été acquis par Dazia Capital fin 2024 pour 37 millions d’euros. Le projet prévoit sa conversion en 35 appartements de standing selon un modèle de construction-vente (BTS).

Des projets immobiliers tels que Recoletos (14), María de Molina (42), Sagasta (31-33) et Zurbarán (28) ont été acquis par des investisseurs en vue de la construction de logements haut de gamme.

Parmi les autres projets notables figurent Recoletos (14), María de Molina (42), Sagasta (31-33) et Zurbarán (28), également acquis par des investisseurs pour la construction de logements haut de gamme. L’ancien hôtel particulier du marquis de Frómista, situé au 21, rue Velázquez, fait actuellement l’objet d’un projet exclusif de 8 à 10 appartements de luxe.

À Barcelone, à l’angle du Passeig de Gràcia et de l’Avinguda Diagonal, le groupe d’investissement KKH Property Investors a rénové et agrandi l’ancien immeuble de la Deutsche Bank afin d’y aménager 30 appartements ultra-luxueux exploités sous la marque Mandarin Oriental, ainsi que 4 penthouses avec services cinq étoiles, pour un investissement estimé à 160 millions d’euros. Les ventes ont atteint des niveaux records dans la ville, avec des prix moyens avoisinant les 30 000 € le mètre carré et des biens immobiliers culminant à 40 millions d’euros.

À Valence, Telefónica a entamé cette année la transformation de quatre de ses immeubles, autrefois bureaux techniques ou centraux téléphoniques, en plus de 150 appartements. Des investisseurs locaux ont également converti de petits immeubles de bureaux en résidences de standing.

Dans le quartier financier de Malaga, l’ancien siège d’un bureau régional, d’une superficie d’environ 2 265 mètres carrés, a été acquis par un investisseur privé espagnol, initialement pour des locations de bureaux de courte durée. Cela laisse présager une stratégie de valorisation visant à le convertir prochainement en appartements.

Séville ne possède pas de grandes tours de bureaux imposantes, mais elle en compte de nombreuses, plus petites.

Toujours à Malaga, de nombreux bureaux désaffectés ont été transformés en appartements touristiques et en locations de courte durée, compte tenu de l’essor du secteur du tourisme. Bien qu’il ne s’agisse pas de logements résidentiels classiques, ces espaces s’inscrivent dans une tendance plus large de reconversion. Des espaces de coliving voient également le jour dans d’anciens immeubles commerciaux de quartiers comme Soho et La Trinidad, aménagés pour proposer des chambres avec services partagés aux télétravailleurs et nomades numériques.

À Séville, la transformation de bureaux en logements est plus fragmentée et à plus petite échelle. La ville ne compte pas de grandes tours de bureaux imposantes, mais de nombreux petits bureaux ou locaux en rez-de-chaussée qui, faute d’usage commercial, sont convertis en logements, comme l’explique cette étude.

Source : Ejpeprime