Article rédigé par Virginie Molinier et Ana Plumed pour MB avocats
La « Sociedad Limitada », équivalent de la société à responsabilité limitée en France et communément appelée « S.L. », présente, entre autres, l’avantage de détenir à la fois les caractéristiques d’une société de personnes (société dont les cessions de parts sont soumises à l’agrément des autres associés) et celles d’une société de capitaux, puisque la responsabilité financière des associés est limitée au montant de leurs apports.
Ainsi, le contrôle des cessions de parts en fait une structure adaptée aux transmissions contrôlées du capital social tout en évitant l’inconvénient majeur de la responsabilité indéfinie et solidaire des associés.
Toutefois, la constitution d’une S.L. exige le respect de plusieurs étapes obligatoires et requiert un certain savoir-faire pratique afin d’éviter les obstacles qui peuvent retarder la constitution et compliquer le processus de la « naissance » de la société.
I. Les associés et gérants des sociétés espagnoles sont tenus d’obtenir, préalablement à la constitution, le NIE (Numéro d’Identification des Etrangers) s’il s’agit de personnes physiques et le NIF (Numéro d’Identification Fiscale) s’il s’agit des sociétés. Le NIE s’obtient pour les personnes physiques personnellement auprès d’un commissariat espagnol (sur rendez-vous pris à l’avance par Internet, avec des délais de plusieurs jours à prévoir) ou auprès d’un consulat espagnol à l’étranger (dans ce cas, les délais d’obtention dépendent de chaque consulat). Le NIF s’obtient auprès de l’administration fiscale espagnole. Toutefois il est possible de déléguer cette démarche à des cabinets d’avocats formalistes, en leur donnant pouvoir pour ce faire, étant précisé qu’il doit s’agir d’un pouvoir notarié. Cette solution permet d’accélérer les demandes tout en évitant des déplacements pour les dirigeants.
II. La deuxième étape pour constituer une S.L. en droit espagnol consiste à choisir la dénomination sociale. En effet, le Registre du Commerce Central espagnol exerce un contrôle sur le choix de cette dénomination qui ne doit pas être identique ou similaire à la dénomination d’une société existante. On se doute bien qu’avec le temps et la multiplication des structures juridiques, cela puisse être bloquant. Toutefois, comme en France, en Espagne une société peut être immatriculée sous un nom (raison sociale) et agir sous un nom commercial distinct qui pourra apparaître sur les documents commerciaux, les cartes de visite, le papier à en-tête de la société ou les factures, etc. À part ces exigences de forme, les associés sont libres de choisir la raison sociale qui leur convient et peuvent notamment choisir un nom complètement abstrait qui ne correspond pas à l’activité de la société.
À ce titre, il est donc judicieux de transmettre préalablement au Registre du Commerce Central jusqu’a 5 choix de dénominations sociales possibles, afin qu’il détermine celle qui pourra être utilisée. Cette étape diffère beaucoup du droit français qui ne requiert pas l’autorisation formelle préalable du registre afin de choisir la raison sociale.
Le certificat de dénomination transmis par le Registre de Commerce Central sera valide pour une durée de trois mois qui peut être renouvelée uniquement une fois (6 mois en tout) et ce, afin d’éviter qu’une personne puisse réserver une dénomination indéfiniment, sans faire aboutir son projet de création de société.
III. Une fois la dénomination obtenue, la seconde étape, tant en droit espagnol qu’en droit français, consiste à ouvrir un compte bancaire au nom de la société en formation. La distinction va reposer ici sur le montant minimum du capital : alors qu’en droit espagnol le capital minimum d’une SARL est de 3.000 € (article 4 LEC), en droit français il est de 1 €.
Une fois le compte bancaire ouvert pour la société en formation, un certificat de dépôt des fonds sera délivré par la banque. Ledit certificat de dépôt des fonds devra indiquer le montant de l’apport, la date du versement et l’identité de l’associé ou des associés qui ont réalisé le dépôt. Il est très important que les personnes qui figurent sur le certificat soient bien les associés fondateurs de la société qui se présenteront ensuite devant notaire pour constituer la société.
IV. Après l’obtention du certificat de dénomination et du certificat du dépôt de fonds, il faudra rédiger les statuts. En droit espagnol, contrairement au droit français, il est obligatoire de signer les statuts devant notaire.
Il convient également de souligner que la complexité de la rédaction des statuts est bien trop souvent prise à la légère et les associés se contentent parfois de rédiger leurs statuts sur la base d’un simple modèle. Or, cette pratique peut s’avérer préjudiciable sur le long terme et engendrer des coûts considérables. En effet, à la différence de la France, toute modification statutaire en Espagne doit s’effectuer devant un notaire, entraînant de facto des frais supplémentaires.
Une bonne rédaction des statuts permettra de s’adapter aux particularités de chaque société en prévoyant, par exemple, une délimitation précise des cas d’exclusion ou de séparation des associés. En effet, certaines dispositions de la loi ne sont pas impératives et peuvent effectivement être adaptées à chaque cas d’espèce.
Par conséquent, il est fortement recommandé de se faire assister par un avocat pour ces démarches qui nécessitent une certaine expertise. Cela permettra d’éviter une rédaction des statuts trop rigide.
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