Au plus profond de la crise, qui s’accentue et met à mal, chaque jour davantage, la structure économique, financière et sociale de l’Espagne, parvient une bonne nouvelle, de nature à insuffler un peu d’optimisme face aux sombres pronostics pour la nouvelle année. Il s’agit des excellents résultats obtenus en matière de commerce extérieur, notamment dans les échanges franco-espagnols, au cours des 10 premiers mois de 2011 qui se profile comme une année record à cet égard. Cette période a vu s’affirmer l’amélioration de la balance commerciale initiée à partir de 2008. Depuis 2001, le solde en était déficitaire, avec un pic de 100 milliards d’euros atteint en 2007. A partir de cette année-là, il n’a cessé de décroître, pour se situer, en octobre 2011, à son niveau le plus bas depuis 10 ans: 39,1 milliards d’euros. Entre 2001 et 2010, les exportations ont progressé cumulativement de 44 % et les importations de 38,5 %, avec un accroissement annuel moyen respectivement de 4,4 % et 4,1 %. Mais rien que dans les 10 premiers mois de 2011, par rapport à la même période de l’année précédente, les exportations ont fait un bond de 16 %, soit presque autant qu’entre les années complètes de 2009 et 2010, face à une hausse de seulement 10,1 % des importations (contre 16,8 % entre 2009 et 2010). Au plan géographique, il est à noter qu’en 2011, pour la première fois, les échanges avec les pays de la zone euro ont dégagé un solde en faveur de l’Espagne (+ 1,4 milliards d’euros) alors qu’ils étaient déficitaires (- 1,2 milliards d’euros) dans la même période de 2010 ainsi que dans les années précédentes. Plus de la moitié (52,8 %) des ventes extérieures ont été réalisées dans la zone euro, cependant que les échanges avec l’Union Européenne (66,2 % des ventes) ont dégagé –également pour la première fois- un solde positif (+ 3 milliards d’euros) face à un déficit (- 4,7 milliards d’euros) pour la même période de 2010 et pour les années antérieures. De même, c’est la première fois que les échanges avec la zone OCDE, qui regroupe les principales économies de la planète, sont équilibrés, alors qu’ils étaient constamment déficitaires avant 2011. Si on excepte l’Océanie (incluant l’Australie et la Nouvelle-Zélande), la balance commerciale avec les autres zones géographiques du monde (Asie, Amérique, Afrique) demeure déficitaire. Encore convient-il de souligner, en 2011 par rapport à la même période de l’année précédente, la forte poussée des exportations vers les pays européens non communautaires (+ 30,7 %), l’Amérique du Nord (+ 25 %) et l’Amérique Latine (+21 %). Cette amélioration des termes de l’échange avec les économies les plus avancées s’est accompagnée, en outre, d’un accroissement de la compétitivité face à la plupart de ces économies. Mesurée par la valeur unitaire des exportations, la compétitivité espagnole s’est accrue, respectivement en 2010 et dans le 1er semestre 2011 par rapport à la même période de 2010, de 2,2 % et 0,5 % face à la zone euro, de 2,9 % et 0,9 % face à l’Union européenne, et de 8,6 % et 2,2 % face aux pays de l’OCDE n’appartenant pas à la zone euro. Déterminée à l’aune du niveau d’inflation, pour 2010 et les 9 premiers mois de 2011 par rapport à la même période de 2010, la compétitivité a, en revanche, diminué respectivement de 0,3 % et 0,8 % face à la zone euro, augmenté de 0,7 % puis diminué de 0,5 % face à l’Union européenne, et augmenté de 7,2 % puis diminué de 1 % face aux pays de l’OCDE n’appartenant pas à la zone euro. Si on tient compte du fait que la plupart des produits exportés ne sont pas inclus dans l’indice des prix à la consommation, qui évalue le niveau d’inflation, la valeur unitaire des exportations reflète mieux l’état réel de la compétitivité de l’Espagne sur les marchés internationaux. On voit ainsi par les chiffres susmentionnés le degré d’amélioration de cette compétitivité. L’évolution des échanges franco-espagnols reflète bien l’embellie apportée par le commerce extérieur. Depuis 2008, leur solde excédentaire en faveur de l’Espagne ne cesse de croître. Dans les 10 premiers mois de 2011, il a augmenté de 27,5 % par rapport à la même période de 2010 (+ 8,29 milliards d’euros contre + 6,50 milliards d’euros), atteignant ainsi un niveau plus élevé que l’excédent dégagé dans toute l’année 2010 (+ 7,90 milliards d’euros). Dans les 10 premiers mois de 2011, et par rapport à la même période de 2010, les ventes en France ont augmenté de 13,1 %, contre 8,7 % pour les importations de ce pays. Par ordre décroissant d’importance, les principaux secteurs d’exportation ont été, comme en 2010, l’automobile (26,28 % du total); les produits semi-manufacturés (23,38 % du total), essentiellement les produits chimiques avec les plastiques et les médicaments en tête, suivis par les autres produits semi-manufacturés d’où se détachent le papier et les matériaux de construction; les biens d’équipement (19,98 % du total), notamment les appareils électriques et les véhicules de transport terrestres; les produits alimentaires (14,07 % du total), principalement les fruits et légumes; les biens manufacturés de consommation (7,95 % du total), surtout le textile et l’habillement et les chaussures; enfin, les produits énergétiques (3,96 % du total), presque exclusivement les produits des industries de raffinage du pétrole. Comparativement avec la même période de 2010, le secteur des biens d’équipement a été le principal contributeur à la poussée des exportations, représentant à lui seul 1/3 (+ 1,25 milliards d’euros) de l’accroissement total (+ 3,71 milliards d’euros) interannuel tandis que sa part dans les ventes totales s’est élevée de 18,1 à 20 %. Il est suivi par les produits semi-manufacturés, mais surtout par les produits énergétiques dont ceux des raffineries de pétrole (+ 0,75 milliards d’euros) dont la part est passée de 1,81 à 3,96 % du total. Par référence à la structure des exportations 10 ans avant, soit en 2001, on peut constater un net recul de la part dans le total du secteur automobile (de 32,6 % à 26,2 %), un bond de la part des produits énergétiques correspondant aux produits raffinés du pétrole (0,91 à 3,96 %), une forte augmentation de la part des produits semi-manufacturés (18,7 à 23,3 %) et des biens d’équipement (18,5 à 20 %), un maintien de la part des produits alimentaires (14,02 à 14,07 %), et une baisse de la part des biens manufacturés de consommation (9,5 à 7,9 %) tenant essentiellement au déclin des industries textiles et de l’habillement. Ainsi, ces 11 dernières années ont vu se consolider la tendance à la diversification de la nature des biens exportés, caractéristique d’une économie industrialisée comme est devenue celle de l’Espagne à partir des années 70. Plus des trois quarts des ventes en France concernent les biens manufacturés, et si leur part a légèrement décru au cours de la période précitée c’est au profit des produits énergétiques (dont la participation est passée de 0,91 % en 2001 à 3,96 % en 2011) grâce à l’essor de l’industrie de raffinage du pétrole, surtout à partir de 2008. Le déclin de la contribution aux exportations du secteur automobile dont tout le cycle opérationnel est géré depuis des centres de décision français ou étrangers, reflète bien la situation nouvelle où l’Espagne démontre sa capacité à vendre des produits de qualité conçus et fabriqués par elle-même. Pour les Français d’Espagne désireux de créer leur propre entreprise dans ce pays, cette évolution des échanges commerciaux franco-espagnols est susceptible de faciliter la réalisation de leur aspiration du fait de la multiplication des opportunités d’affaires avec le marché français. De par leur origine, ces entrepreneurs potentiels sont mieux à même de connaître les particularités de ce marché tandis que leur expérience espagnole leur permet de tirer davantage parti des spécificités locales. Ils sont ainsi en mesure d’exploiter de manière optimale les synergies entre les deux économies. Felipe Saez Administrateur de la COCEF